Pour le cas des Beat'em Up ( oui, "beat'em all" , y a que en France qu'on dit ça, merci à feu Player One de nous avoir tous induit en erreur au début des 90' ), faut dire que Street Fighter II est venu chambouler beaucoup de choses (il a vraiment renversé le monde de l'arcade).
Avant, les jeux de combats 1 contre 1 étaient dérivés de ces fameux Beat'em Up, comme s'il ne s'agissait que de combats contre les boss' de fin de niveau. Art of Fighting reste un des derniers à suivre cette conception (on pourrait aussi y ajouter le très particulier Warzard ou "Red Earth" sur CPSIII).
Mais malgré tout (malgré le ras de marée SFII), jusqu'en 95, on a quand même été fourni en Beat'em Up de qualité.
Après, avec l'arrivée des 32-bits, à part quelques essais plus ou moins minables (Fighting Force, Soul Fighter, Oni, le heureusement annulé Streets of Rage IV ...), le genre a disparu . Remplaçé par les jeux d'action/exploration 3D.
Et aussi remplaçé par l'orientation "joueur" des jeux vidéos (le 1VS1, le online multi-joueurs) , alors qu'avant, il s'agissait souvent d'une confrontation avec la machine (affronter le CPU, seul ou en équipe, se mesurer à un level design bien ardu, résoudre des puzzles...).
C'est ça qui manque aux jeux actuels: une bonne confrontation contre la Machine. Un défi solonnel, authentique, sans équivoque, contre une pièce de maître conçue de main experte.
Les jeux modernes n'ont quasiment aucun intérêt à être joués en solo (parce que aucun challenge, et parce que critères d'appréciations déplaçés vers d'autres notions fallacieuses ...)
Que ce soit le Vs Fighting, la stratégie, le FPS, la course ... tous prennent leur dimension à plusieurs joueurs, contre des adversaires humains, avec tout ce que ça implique : imprévisibilité, variabilité, triche, compétences aléatoires ...
Et ça, ça motive pour retourner aux sources du old-school gaming : le défi de la Machine. Rien que voir une borne rutilante, ça amorce un état d'excitation chez le joueur initié. L'adrénaline va couler à flot.
Pour le beat'em Up, de la pure castagne sur un bon scrolling en 2D. tout est connu à l'avance, pas de surprise, pas d'aléatoire, la difficulté va crescendo. Va falloir joué serrér, comme il se doit.
Et ça, ça n'a pas d'équivalent de nos jours.
Il ne s'agit plus seulement d'y jouer par "nostalgie" (se remémorer une époque vécue personnellement), mais retourner chercher ce qui n'existe plus.
D'autres genres existent toujours, et sont simplement up-gradés techniquement. Là, retourner vers une version "obsolète", c'est vraiment de la nostalgie. Personne ne va brandir un "Pole Position" en disant que ça c'était vraiment du jeu vidéo, "c'était mieux avant" blablabla ... Ce n'est pas du "classic gaming" (même si apparu pendant la période classic), déjà parce que c'est toujours actualisé (alors que la période "classic" est révolue, et figée).
Les beat'em Up font vraiment parti de l'ère classic, et ils ont vraiment le feeling inimitable de l'époque.
Aujourd'hui, ça vaut encore le coup de jouer au mythique Final Fight, même s'il a pris un coup de vieux. Même pour ceux qui ne l'ont pas connu à l'époque (et qui donc ne peuvent en être "nostalgiques")
Le Final Fight "Street Wise" sorti y a quelques temps ne peut prétendre être supérieur parce que upgradé techniquement ( 3D, machine plus puissante, plus de "réalisme" ). Le jeu, fidèle aux codes et aux critères de son époque, est bancale et inintéressent. Il n'a même pas une ambiance aussi marquante, "pittoresque" , haute en couleur comme son illustre prédécesseur.
Les concepteurs d'aujourd'hui ne sont plus les concepteurs d'hier, ils ont une autre approche, et ils ne connaissent pas le défi contre la machine.
Tous s'acharnent à faire d'une ce qui n'était pas possible techniquement auparavant, et de deux ce qui n'était pas concevable auparavant: du "réalisme", des situations variées et variables (altérée) en cours de jeu.
Se rapprocher du monde réel, avec des contraintes et réactions réelles, faire en sorte que les protagonistes à l'écran se comportent de façon réelle, aient des capacités et faiblesses réelles (fatigue, blessures).
Avant, dans un jeu de tir, en dehors des items spéciaux, on avait le tir illimité d'office la grande majorité du temps. Personne en se disait que c'était pas réaliste cette puissance de feu ininterrompue. Personne ne se disait non plus que c'était pas réaliste qu'un personnage parcours des kms et des kms à pieds en castagnant tout ce qui bouge sans jamais éprouver une diminution des capacités lié à la fatigue, ou à la vitalité proche de zéro (il te reste 1% d'énergie, c'est comme s'il y en avait 100%: tous les stats sont maintenus quoi qu'il arrive, la puissante, la vitesse, l'agilité ...).
Avant, personne ne souhaitait donner une "individualité", une identité propre à chaque punk ou voyou rencontré dans les rues mal famées ^^ . Dans le Beat'em Up, une floppée de types d'adversaires, avec un sprite dédié aux couleurs changeantes selon la résistance (aussi parceque pas assez de mémoire pour enregister 100 sprites et routines différentes), et hop! c'est pesé. Chaque type à un comportement/ des aptitudes définies à l'avance, ça ne change jamais.
Toute la difficulté et la progression dans le jeu consistent à jauger les priorités et le placement, et savoir enchaîner les bons coups. Limpide.
Quand tu vois aujourd'hui un FPS militaire réaliste, avec des comportements scriptés plus ou moins "plausibles", et avec une dramatisation de la mort de la cible atteinte (genre le cri d'agonie , et l'animation surdétaillée de l'effondrement du corps, qui en plus restera visible à l'écran ), tu te dis que ce n'est plus la même chose, y a un esprit et une approche différente.
Là, il ne s'agira que d'up-grade techniques, et d'ajout systématique de mode multi-joueur online pour palier les faiblesses de l'IA (et l'absence de micro-processeurs dédiés à cette IA ).
Pas de chance de revenir en arrière, vers un jeu dont la crédibilité souffrira de l'obsolescence technique (moins réaliste, moins fini).
Peut-être un soupson de nostalgie ( "- oui, je me rapelle quand je jouais à ce jeu avec mes potes, on avait bien trippé !" ). Guère plus.
Et ça vaut pour l'énorme majorité des jeux "modernes" (depuis 1995 on va dire).
Quel intérêt de préserver tout ça ? Pas grand intérêt, même pour les joueurs ayant commencé par là , qui seraient susceptibles d'éprouver de la "nostalgie" plus tard. Nostalgie qui serait sitôt suivi d'une certaine répulsion ( "- Comment ? c'est ça qu'on trouvait réaliste à l'époque ? Mais c'est trop naze et trop moche par rapport à ce qu'on a aujoud'hui !").
La morale : tout ne se vaut pas , tout n'est pas intemporel, et tout ne devient pas "classic" .